Il était haut, très haut et, de mes neuf ans, je ne savais vraiment pas comment j'allais pouvoir parvenir au sommet. A côté de moi, Dean avait son habituel sourire moqueur, celui qui voulait dire: "tu vois que j'ai raison et tu n'es pas capable de le faire".
DEAN: Qu'est-ce que tu attends Kay ? Que ton cher petit papa arrive et qu'il demande à un de ses nombreux domestiques de récupérer ton ballon... Evidemment, quelle question.
Je le fixais avec un air défi et entrepris alors de grimper à l'arbre en m'accrochant aux prises que je trouvais. Evidemment que je pouvais monter en haut de cet arbre pour récupérer ce maudit ballon, je n'étais pas n'importe qui après tout, j'étais Kaylleigh Catherine Douglas et il ne fallait pas me prendre pour ce que je n'étais pas. Je progressais lentement mais sûrement et bientôt je saisissais le ballon et lui lançais avec un regard victorieux.
KAY: Tu disais ?
DEAN: T'es fière hein ? T'as plus qu'à sauter maintenant.
Je lui lançais un regard noir et descendis lentement, c'était toujours comme ça avec lui, jamais je ne parvenais à lui clouer totalement le bec, il aimait avoir raison et se sentir supérieur, c'était comme ça. Je connaissais Dean depuis le berceau, nos parents étaient très proches et nous avions grandis ensemble. C'était mon meilleur ami et mon pire ennemi, mon frère, mon confident, mon rival. Quelque chose me disait que j'aurais du être triste pour elle, c'était ma meilleure amie et son couple se brisait, ou encore j'aurais du m'en vouloir parce que tout ça était de ma faute mais pas du tout. J'étais heureuse, heureuse parce que depuis quelques semaines je vivais un vrai bonheur.
C'était arrivé sans que je m'y attendes ou sans que je décides quoi que ce soit. Je n'aurais su dire à quel moment exactement mes sentiments à l'égard de Dean était passé de l'amitié à l'amour mais ils avaient changés c'était un fait. Et puis il y avait eu mon anniversaire, mes 17 ans. J'avais trop beau, il avait trop beau, tout le monde avait trop bu, mes parents étaient partis toute une semaine et j'avais eu la grande maison et son grand bar pour moi seule
KAY: T'inquiètes, personne ne saura que tu avais peur d'aller chercher ce ballon toi-même, je serais une tombe.
***
CLELLA: Ca te tuerait de m'écouter quand je te parles Kay ?
KAY: Excuses-moi, je... pensais. Tu me disais quoi ?
CLELLA: Je te parlais de Dean, je comprends vraiment pas ce qu'il a dans la tête ces dernières semaines, je crois qu'il m'évites...
Et c'était reparti, je comprenais pourquoi mon esprit s'était déconnecté dès qu'elle avait ouvert la bouche pour ça et aussi parce que la personne qui occupait tout le temps mes pensées ses dernières semaines se tenait à seulement quelques mètres de là. Clélla parlait, parlait, je ne l'écoutais pas mais je devinais exactement ce qu'elle me disait: "Je ne comprends pas, on sort ensemble tout de même, il devrait être content de me voir, de sortir avec moi mais pas du tout on dirait juste que ça le fait chier... qu'est-ce uqe t'en penses Kay, c'est ton meilleur ami non ? Tu dois bien savoir ce qui lui passe par la tête et blablablabla..." Quelque chose me disait que j'aurais du ressentir de la compassion à son égard, après tout son couple était en train de se brisait ou encore, j'aurais du m'en vouloir parce que tout ça était de ma faute mais je n'y parvenais pas. J'étais trop heureuse et le pire était que ce qui faisait son malheur, faisait mon bonheur.
C'était arrivé sans que je le veuilles et sans que je m'y attendes. Je ne sais pas exactement quand mes sentiments pour Dean étaient passés de l'amour à l'amitié mais ils avaient changés c'était indéniable. Plus le temps passait moins je supportais de voir Clélla, cette blonde sans cervelle qui était pourtant ma meilleure amie au bars de Dean. Les jours passaient et je devenais détestable avec elle, avec lui, avec tous. Puis il y avait eu mon anniversaire, mes 17 ans. Une fois n'étais pas coutume, mes parents avaient pris des vacances me laissant seule dans la grande maison avec le bar plein. La fête avait été superbe, et j'étais bien bourrée à la fin, lui aussi. Peut-être était-ce pour ça que les choses avaient été aussi loin entre nous, je n'avais fait l'amour à personne avant lui et ce moment avait été magique et je savais que malgré mon état d'ébriété il resterait à jamais graver dans ma mémoire. Nous nous étions vite mis d'accord là-dessus, ce n'était pas une erreur et depuis, j'attendais avec impatience de pouvoir passer un moment seule avec lui, loin des regards des autres. Juste lui et moi.
***
PAUL: Laura, les clients attendent l'addition à la table trois.
Je mis un certain temps avant de comprendre que Paul s'adressait à moi. Je ne m'étais pas encore totalement habitué à mon nouveau nom. Laura Sarah Karlson. Ca sonnait tellement étrange dans ma tête. Pourtant j'allais devoir m'y habituer, Kay n'étais plus là et je ne la retrouverais jamais. Elle était morte ce fameux jour de mai...
Je secouais la tête et me dirigeais mécaniquement jusqu'à la table trois. Il ne fallait pas que j'y pense, cela me faisait trop de mal, j'y pensais suffisamment la nuit. Je fis mon plus beau sourire aux clients en leur tendant la note et j'essayais d'avoir l'air la plus heureuse et la plus sereine possible. Je réussissais de mieux en mieux à cet exercice, d'ici peu personne ne pourrait soupçonner les terribles démons qui m'habitaient.
Cela faisait maintenant trois mois jours pour jour que j'avais quitté Seattle, je n'avais pas pu faire autrement, là-bas je n'y arrivait pas, faire bonne figure était trop difficile. L'enterrement de Clélla avait été une véritable épreuve pour moi, les gens s'étaient déplacés en nombre pour faire un dernier adieu à la jolie blonde. Il faut dire que la nouvelle de sa mort avait fait l'effet d'une bombe atomique. Comment une fille de bonne famille comme elle qui avait tout pour elle et qui n'allait pas tarder à se marier avait-elle pu se suicider de cette manière ? Personne n'avait deux réponses et personnes ne savaient réellement ce qui c'était passé ce jour-là. Enfin personne... J'avais regardé Dean voir comment il était, il avait l'air parfaitement bien en accord avec lui-même, pas du tout comme quelqu'un qui avait tué sa fiancée. Il avait croisé mon regard et j'avais détourné la tête. Il savait que je savais...
C'était dans un état de panique que j'avais pris ma décision. Le lendemain de l'enterrement de Clélla, je quittais ma maison avec un petit sac et un peu d'argent en poche. Je ne savais pas où j'allais ni ce que j'allais devenir mais je ne voulais pas rester par là plus longtemps. Mes parents ne remarqueraient même pas que je n'étais plus là et puis tout le monde s'en porteraient bien mieux. C'est ainsi que j'étais devenu Laura Sarah Karlson, une jeune serveuse souriante mais malgré tout renfermée sur elle-même. J'essayais d'avancer, de faire ma vie en oubliant mai ce n'étais pas si simple. Ce soir, je rentrerait chez moi et je prendrais un peu de la drogue ranger dans mon armoire et le temps de quelques heures, j'irais mieux... un peu.